Page:Paul Vibert - Pour lire en bateau-mouche, 1905.djvu/354

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 327 —

referme sa ganache et dévore le chapeau… Mais, horreur, s’il a saisi les cheveux avec et que, par hasard ce ne soient pas des postiches, la malheureuse est horriblement défigurée et ensanglantée, quand elle n’est pas scalpée sur le coup, comme ça ne s’est vu que beaucoup trop souvent.

Oui, tous les jours, les femmes perdent ainsi leurs chapeaux, mangés par les chevaux de fiacre ou d’omnibus aux stations où il y a encombrement, oui, à tout bout de champ, elles sont scalpées ou tout au moins défigurées pour le restant de leurs nuits, et les jeunes filles ne trouvent plus à se marier, et ça fait encore baisser le niveau déjà à sec de la natalité.

Comme vous le voyez, il y a donc là une situation tout à fait intolérable, si intolérable que les cochers (le fiacre eux-mêmes, qui paient une assurance pour tout risque d’écrasement des piétons, sont, paraît-il, décidés à payer une prime un peu plus forte pour s’assurer également contre les risques que leur font courir leurs rossinantes en mangeant continuellement les couvre-chefs — avec un S, comme l’exige l’Académie, ce qui est absurde, car on n’a jamais qu’une tête — des séduisantes citoyennes de Paris la Grand’Ville !

Et pour me résumer :

J’accuse les Parisiennes d’être d’une imprudence impardonnable, en continuant à porter des chapeaux à fleurs.

J’accuse les chevaux d’être d’une gourmandise aussi indécente que folichonne ;