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bien : pour chevaux. Lorsqu’il y a trois ou quatre ans, je montrais dans le Théâtre de la nature, à la Bodinière, tous les chevaux coiffés de chapeaux à New-York, mes auditeurs éclataient de rire. Cela n’empêche pas que l’idée était bonne pour éviter des insolations aux pauvres bêtes, et, depuis, chaque année, la Société protectrice des animaux distribue gratuitement des milliers de chapeaux pour chevaux aux cochers qui vont les chercher. Aussi la mode n’a pas tardé à s’emparer de l’affaire ; on a commencé par mettre de modestes yokohama sur la tête des chevaux, puis des cochers plus coquets se sont mis à les faire border d’une ganse rouge. Puis les filles des blanchisseurs, qui portent le linge à domicile, avec leurs robustes percherons, se sont mises timidement à insérer un nœud de couleur, une cocarde au bout du chapeau, entre les deux oreilles du pacifique coursier.

C’en était fait ; une industrie nouvelle était née, et, comme toujours, partie des États-Unis, c’est la France qui devait lui donner le suprême et définitif cachet de haut goût et d’inimitable élégance !

Aussi, immédiatement, les modistes les plus avisées se sont-elles dit avec juste raison que, du moment qu’elles coiffaient la plus belle moitié du genre humain, il n’y avait aucun motif pour qu’elles ne coiffassent pas également les chevaux, la plus belle conquête de l’homme après le chien.