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dans ses organes, toute la lumière, toute la justice et devant l’opinion publique, très surexcitée, il avait été tout à fait impossible de faire fonctionner l’éteignoir, — petit instrument qui ne sert plus d’ailleurs qu’à étouffer la vérité, depuis que les chandelles ne sont plus d’un usage courant.

C’est ainsi que sur le drame passionnel s’était tout à coup et violemment greffé tout un drame de petite ville de province. Les passions s’étaient rapidement envenimées, l’agitation avait gagné tout le département pour le moins et toute la contrée s’était divisée en deux camps, s’injuriant, se jetant à la tête les calomnies les plus odieuses et faisant entrer naturellement la politique et la religion dans une affaire purement passionnelle qui m’avait rien à y voir.

Rien que pour raconter ces luttes homériques, à la veille des débats en cour d’assises, il me faudrait un volume. Je passe, car mes lecteurs qui connaissent bien la province, comprendront et reconstitûront la situation, aussi bien que moi.

En désespoir de cause on avait, d’un côté, voulu faire passer le coupable pour fou. Un accès subit, un transport au cerveau, etc.

Mais Les adversaires répliquaient qu’il était difficile de faire passer pour fou un grand et riche industriel qui conduisait admirablement ses affaires et même celles de la ville dont il était le premier adjoint et en réalité le maire, ce dernier étant toujours malade et incapable de rien faire.