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pourront faire juger de l’esprit qui règne parmi celles que chantent les paysans et les marins gallots.

Jusqu’à présent, je n’ai rien recueilli qui eût un caractère héroïque ou qui fit clairement allusion à un trait d’histoire locale.

Les noëls qui se chantaient autrefois en grand nombre ont aujourd’hui à peu près disparu, et je n’ai pu en retrouver que des fragments. Cependant il y a quelques pays où l’usage de chanter des noëls n’est pas tout à fait passé ; naguère encore, à Dinan, des jeunes gens allaient réciter la vie d’Hérode, sorte de tragédie en alexandrins incorrects qui se vendait autrefois dans les foires : c’était une plaquette à couverture bleue, imprimée à Dol sur papier à chandelle. Un jeune garçon représentait les enfants juifs, et on faisait mine de lui couper la tête avec un sabre de bois.

L’usage de chanter la Passion a persisté davantage, et en beaucoup de communes les jeunes garçons vont de ferme en ferme psalmodier sur un air traînant une pièce de vers en alexandrins approximatifs qui est un résumé de la Passion et ressemble à un prologue.

Jadis, au lieu de cette sorte de cantique, on chantait parfois une complainte héroï-comique dialoguée dont je n’ai retrouvé qu’un fragment, assez plaisant du reste ; le voici :

Quand saint Pierre coupit
À Malchus l’oraïlle,
L’bon Jésus li dit
Tout bas dans l’oraïlle :
— Pierrot ! — Quaï ! mon bon Dieu ?
— Rengaîne ton queuté (couteau),
Mon boudé (chéri, ami),
Rengaine ton queuté.

Pendant les derniers jours de la semaine sainte, surtout dans