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au 2e régiment d’artillerie-pontonniers.

lerie, ils souffraient jusqu’à ce qu’on les rendit au service en dehors duquel ils ne pouvaient vivre.

La seconde catégorie était celle des pontonniers « par force », des officiers qui étaient sortis les derniers de l’École d’application, ou qui, venus de l’artillerie, laissaient dire par leurs mères ou leurs femmes qu’on les avait envoyés au régiment pour en relever le niveau. Cette pensée, cependant, ne suffisait pas à les consoler de leur infortune, et, par tous les moyens possibles, ils cherchaient à s’y soustraire.

Enfin, quelques officiers, venus tardivement aux pontonniers sans l’avoir désiré, s’étaient habitués peu à peu à l’idée de finir leur carrière dans un service relativement facile et dans une garnison très appréciée. Au bord de la Loire, ils allaient d’un pas tranquille et lent, tantôt surveillant leurs bateliers indolents qui remontaient doucement à la gaffe, tantôt regardant les grands bateaux du commerce qui attendaient le vent de la mer pour remonter jusqu’à Angers et les voiles immenses qui paraissaient si blanches sur les arbres des îles de la Loire ou sur les riants coteaux de la Pointe et de Bouchemaine.

Le pontage alternait avec la navigation. Le capitaine faisait un commandement, un seul, et le pont se construisait par bateaux successifs ou par portières, comme il l’avait dit. Il pensait alors sans regret au temps passé, lorsqu’il commandait sa batterie au polygone, lorsque, tenant d’une main son sabre, de l’autre son cheval qui l’emmenait, perdu dans la poussière et le bruit des caissons, il cherchait, dans une tension d’esprit continue et énervante, à entendre les commandements, à deviner les mouvements et à garder les intervalles et les distances. Ces