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Il ressemble beaucoup plus à un parc, car les plaines ondulées sont parsemées çà et là de bouquets d’arbres. Les berges s’élèvent jusqu’à cent cinquante ou deux cents pieds en collines insensibles couvertes de verdure. Le fort, distant d’un quart de mille de la rivière, est entouré de pieux de bois et fortifié avec des espingoles et des pierriers montés dans le bastion. Il est plus exposé aux attaques des Pieds-Noirs qu’aucun des autres établissements de la compagnie. Les chevaux ont souvent été volés sans qu’on osât sortir du fort pour les aller reprendre. Les bisons sont ici abondants, à n’en juger que par les nombreux ossements épars dans le voisinage.

Nous restâmes au fort Carlton pendant plusieurs jours pour attendre les embarcations. Le deuxième soir de notre séjour, nous vîmes avec terreur un incendie se déclarer à l’ouest, dans les prairies : heureusement, quand le feu arriva à un demi-mille du fort, le vent changea et tourna au sud. Nous restâmes debout cependant toute la nuit, de crainte d’accidents. Quelques Indiens crees se tenaient aux approches du fort, qui est un endroit de commerce pour cette peuplade, une des plus importantes de celles qui obéissent à la compagnie d’Hudson. Cette tribu est de temps immémorial en guerre avec les Pieds-Noirs, qu’elle a même soumis une fois à sa domination. Aujourd’hui encore, les Crees traitent les Pieds-Noirs d’esclaves, bien qu’ils aient reconquis leur indépendance et soient courageux à la guerre. Ces guerres indiennes se prolongent d’années en années, et si elles étaient aussi meurtrières en proportion que chez les nations civilisées, la race indienne serait bientôt anéantie ; mais par bonheur les Indiens se contentent de petites victoires, et pourvu