Page:Paul Kane - Les Indiens de la baie d'Hudson.djvu/238

Cette page a été validée par deux contributeurs.
224
LES INDIENS DE LA BAIE D’HUDSON.

de son arme les doigts de l’ennemi, jusqu’à ce qu’il les lui ait presque coupés, et quand à la fin l’Assiniboine lâche prise, il lui enfonce son coutelas dans le cœur. » François me raconta lui-même cette histoire à peu près dans les mêmes termes ; il ajouta que le sauvage ne mourut pas immédiatement, quoiqu’on pût voir battre son cœur à travers l’ouverture que lui avait faite le coutelas, il expira en retenant encore le lasso des chevaux.

À six milles du fort, nous vîmes un énorme ours dans notre voisinage, mais François ne voulut pas l’attaquer, quoique je lui eusse dit que j’avais déjà aidé à en tuer un.

Un homme plus jeune que lui, qui aurait eu sa réputation à établir, aurait peut-être tenté l’aventure ; mais François ne voulait pas s’exposer en attaquant un animal aussi formidable avec un seul compagnon. Le fait est que ces animaux sont très-redoutables à cause de leur force et de leur agilité, aussi ne sont-ils guère attaqués que par des jeunes gens, qui les tuent pour pouvoir fièrement porter leurs griffes suspendues à leur cou, ce qui compose l’un des plus beaux ornements dont puisse se parer un chef indien. L’ours marchait toujours ; il nous regardait de temps en temps, mais avec un air de mépris. Mes doigts brûlaient de pousser la détente de mon fusil ; il paraissait si facile de l’abattre, et sa fourrure était si belle ! Mais quoique mon fusil fût à deux coups, et que François fût à mon côté, ce qui nous donnait la presque certitude de pouvoir lui envoyer trois balles dans le corps, nous savions pourtant qu’il y avait dix chances contre une que cela ne suffit pas pour tuer l’ours assez vite et pour empêcher une lutte corps à corps.