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Histoire de l’hébreu biblique

nous permet de constater que peu de variations consonantiques et très peu de variations vocaliques. Il est donc fort probable que le texte consonantique a été plus ou moins uniformisé au cours des âges, et il est certain que les diverses parties du texte consonantique, à quelque siècle qu’elles appartiennent, ont reçu une vocalisation uniforme. Les Naqdanim du VIIe siècle ont imposé la prononciation synagogale de leur temps aux textes les plus anciens comme aux textes les plus récents, pour lesquels seuls elle est substantiellement exacte.

En dehors de l’uniformisation du texte consonantique due aux copistes et de la vocalisation uniforme imposée par les Naqdanim, il y a un élément d’uniformité qui provient de la volonté des écrivains eux-mêmes. Si la langue des derniers écrits bibliques ressemble si fort à celle des écrits les plus anciens et diffère tant, par contre, de celle de la Mishna (IIe s. ap. J.-C.), c’est que l’hébreu de la Mishna reflète la langue parlée dans les écoles à l’époque de sa composition, tandis que les derniers écrivains bibliques ont généralement voulu imiter, en quelque mesure, le type à la fois sacré et classique des livres anciens. L’imitation, si imparfaite soit-elle, nous empêche de pouvoir regarder l’hébreu biblique de la dernière époque comme l’image de la langue parlée d’alors.

De tout ceci il ressort combien il est difficile de connaître l’évolution de l’hébreu biblique. La difficulté apparaîtra encore plus grande si l’on considère que nous ignorons la date, même approximative, de la composition ou de la rédaction de certains écrits[1].

b Nous nous contenterons donc de distinguer dans l’histoire de la langue hébraïque deux grandes périodes : la période préexilienne et la période postexilienne. La période préexilienne est l’âge d’or de la langue ; c’est, si l’on peut dire, la période de l’hébreu classique. Dans la période postexilienne la langue s’altère, en partie sous l’influence de l’araméen, qui devient de plus en plus exclusivement le langage

  1. Il serait aussi fort intéressant de savoir quelle langue parlaient les Israélites au temps de l’Exode, après plusieurs siècles de séjour en Égypte, quelle langue ils parlaient au moment de leur entrée en Canaan. Sur ce dernier point, on peut voir Bauer (Histor. Gramm. der hebr. Sprache, 1, p. 23) qui opine pour l’araméen, lequel n’était alors, d’après lui, qu’un dialecte de l’arabe. Mais les raisons alléguées ne sont pas convaincantes.