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TROISIÈME PARTIE

LE SERMENT DE LAGARDÈRE



I

RÉUNIS PAR LES GRÂCES


La foire Saint-Germain a tenu une grande place dans l’histoire de Paris, non pas tant seulement au point de vue commercial que comme le seul lieu de la ville ayant offert, pendant, des siècles, le tableau le plus réel et le plus complet des mœurs successives de ses habitants.

Elle était située sur l’emplacement occupé ensuite par le marché Saint-Germain depuis la rue de Tournon jusqu’au Luxembourg. Au commencement du moyen âge, elle était le privilège des abbés et religieux de Saint-Germain-des-Prés.

Par charte datée de 1176, l’un de ces abbés, Hugues, céda à Louis le Jeune la moitié des revenus de la foire et l’autre moitié revint au roi en 1278, après une sanglante bagarre entre les escholiers et les domestiques de l’abbaye. Condamnés en effet à payer quarante livres de rente pour la dotation de deux chapellenies fondées en expiation du meurtre de l’escholier Gérard de Dôle, les religieux préférèrent se dessaisir de leurs droits sur la foire, à la condition que Philippe le Hardi paierait les quarante livres.

Philippe le Bel la transféra aux Halles de Champeaux et ce fut seulement Louis XI qui la rétablit au faubourg Saint-Germain, par lettres patentes données à Plessis-les-Tours, en mars 1482.

On éleva donc, en 1648, trois cent quarante loges dans les jardins de l’hôtel de Navarre. Augmentées, restaurées, détruites en partie par des incendies successifs, elles le furent en totalité dans celui qui eut lieu la nuit du 16 au 17 mars 1763.

On les reconstruisit l’année suivante et la tourmente révolutionnaire aidée de la vogue qui allait aux nouvelles galeries de bois du Palais-Royal purent enfin balayer ce champ de foire célèbre où, durant des siècles, on avait vendu