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LA PRISON

fut si cher… » C’est pourtant cet ultimatum que Mme Darras m’a signifié en quittant sa maison et qu’elle me signifie par vous en ce moment ?… Je ne l’ai pas accepté avant-hier et je ne l’accepte pas davantage aujourd’hui… Vous vous êtes acquitté de son message pour moi, voici celui dont je vous charge pour elle : si d’ici à quarante-huit heures elle n’est pas rentrée rue du Luxembourg, elle n’y rentrera jamais. Je peux encore pardonner son action en la qualifiant d’impulsive, comme vous le faites vous-même. Prolongée et par conséquent réfléchie, elle s’aggraverait à mes yeux, singulièrement. J’y verrais, — je ne mâcherai pas mes mots, — la plus abominable tentative de chantage sentimental. Répétez-lui ces termes, j’y tiens, et que, dans ce cas, je ne reculerai devant aucun moyen pour ravoir ma fille, devant aucun… Si elle rentre, je la recevrai, et j’oublierai ces deux jours d’aberration. Mais il me faut une garantie. Elle m’a offensé en me menaçant de partir, offensé en partant, offensé en me faisant parler par une tierce personne. Je veux qu’elle ait pris l’engagement de ne pas recommencer. Pour cela, j’exige, entendez-vous bien, monsieur Euvrard, j’exige qu’elle reconnaisse sa faute. Elle devra me déclarer formellement qu’elle retire tout ce qu’elle m’a dit dans notre dernière conversation et que je vais préciser. Elle m’a dit qu’elle ne se considérait pas comme mariée par un simple mariage civil ; elle se rétractera et dira que ce mariage est valable. Elle m’a dit que la naissance de notre enfant était coupable, et que nous n’avions pas le droit de l’avoir ; elle se rétractera. Elle promettra de ne plus jamais, jamais, jamais faire aucune allusion à un mariage à l’église entre nous. Moyen-