Page:Paul Bourget – Un divorce.djvu/237

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
223
L’IMPRÉVU

nous avons à vous remercier. Je suis assuré d’être l’interprète de Mme Darras, en vous priant de répéter aux deux personnes qui vous envoient que son refus est et restera absolu, » — Gabrielle esquissa un geste d’assentiment, — « parce qu’il est fondé sur des questions qui touchent à l’honneur. Je suis certain, maître Mounier, que vous les ignorez et que votre principal client les ignore aussi. Je vous demande, puisque vous vous êtes fait son messager, de vouloir bien lui transmettre mes paroles. Si vous le permettez, je vous en donnerai le commentaire en vous renseignant exactement sur cette Mlle Planat que mon beau-fils prétend épouser… »

— « Il m’est impossible de vous suivre sur ce terrain », interrompit le notaire. « M. de Chambault ne m’a pas communiqué les raisons qu’il avait de consentir au mariage de son fils, et je ne veux pas savoir celles que Mme Darras peut avoir de ne pas y consentir. Le père reste libre jusqu’au dernier jour de révoquer l’autorisation qu’il a donnée, et, dans ce cas-là, M. Lucien, n’ayant que vingt-trois ans, ne pourra pas se marier avant deux autres années. Mais faites parler à M. de Chambault par d’autres. Pour moi, ma mission est terminée. Si votre résolution ne doit pas se modifier, j’aurai l’honneur, madame, de me présenter de nouveau dans les conditions que je vous ai dites. Pour vous laisser tout le temps de la réflexion, ce ne sera pas avant huit jours… »

— « C’est tout réfléchi… » dit Gabrielle à son tour. Un projet qui venait de s’ébaucher dans son esprit lui rendait l’énergie de parler. « Dans huit jours, M. Darras et moi nous penserons ce que nous pensons aujourd’hui… » Le notaire ne fut pas plus