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UN DIVORCE

que je n’ai même pas soupçonnée… Quand l’as-tu faite ?… Réponds ? »

— « Avant-hier. »

— « Ainsi, » gémit-il, « pendant que je m’occupais de ton fils avec tant de dévouement pour toi. pendant que je me reprochais d’avoir à te cacher mes craintes à son endroit, pour ne pas t’inquiéter, toi, tu me trahissais. Oui. C’est trahir un homme, vivant comme nous vivons, que de se cacher de lui. Et ce cri de la conscience dont tu viens de parler, tu ne l’entendais pas ? Tu n’avais pas de remords de ce mensonge ?… »

— « Moi non plus, je ne voulais pas t’inquiéter, » répondit-elle. « Je savais que tu serais si malheureux de mon retour à la foi ! Et j’avais tant besoin de communier avec ma fille !… Je voulais me confesser… »

— « Tu t’es confessée ?… » demanda Darras. Il avait mis dans cette question une âpreté plus haineuse encore, celle du mari pour qui le confesseur n’est pas le représentant anonyme et impersonnel du Juge invisible, mais un homme apparu entre l’épouse et l’époux.

— « Ni le Père Euvrard ni l’autre prêtre n’ont voulu recevoir ma confession, » répondit Gabrielle, « dès qu’ils ont su que j’étais divorcée et remariée. »

— « Tu l’avoues donc ! Ils t’ont dit que ton mariage n’était pas un mariage ! » reprit Darras. « Et tu les as écoutés ? Et tu les as crus ? Tu les crois ?… »

— « Tout ce qu’ils m’ont dit sur notre mariage, » répondit-elle, « le catéchisme me l’avait déjà dit… Par pitié, Albert, attends, pour me juger, que nous ayons repris cette conversation. En ce moment,