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FIANÇAILLES

ments, pas un de vos principes, pas un de vos actes, depuis que je vous connais et auparavant, que je l’aie discuté comme s’il s’agissait d’une autre que vous, à la lumière qui ne trompe pas, celle de la conscience… Au sortir de cet examen, j’ai trouvé que je ne vous avais jamais tant chérie, tant estimée, vous aviez raison, quand vous me disiez que je ne devais pas vous juger avant de vous avoir entendue. Je vous ai entendue, et je sais qu’à aucun moment vous n’avez cessé d’être celle dont j’ai tant admiré, dès le premier jour, la noblesse d’âme et la hauteur d’idées. Je sais que vous êtes digne de tous les respects que l’on doit à une créature humaine qui s’est elle-même toujours respectée. Si, dans un premier instant d’aberration, je vous ai parlé autrement que je ne vous parle, je vous demande de me le pardonner. J’ai été fou. Je ne voyais pas, je vois. Je ne comprenais pas, je comprends. Vous m’avez fait regarder bien en face ce problème du mariage auquel je n’avais jamais pensé par moi-même. Les esprits qui se croient les plus libres ont de ces routines, à leur insu. Je me suis demandé en quoi il consistait essentiellement, et je n’ai trouvé qu’une réponse, la vôtre : le mariage, c’est un engagement entre une conscience d’homme et une conscience de femme. Qu’ajoute la loi à cet engagement ? Rien, sinon des conditions de garantie. Ces conditions n’augmentent pas plus la validité du contrat qu’une signature n’augmente la validité d’une dette. J’en ai conclu qu’en contractant l’engagement que vous avez contracté, il y a cinq ans, sans cette garantie, mais avec une absolue bonne foi, vous vous êtes conformée aux règles de l’Éthique éternelle Votre action était