vement de l’insomnie, et, au milieu de cette infinie détresse, le travail de la conversion achevait de s’accomplir dans cette âme, cet indicible et inexplicable retournement de l’être dont le Docteur de la grâce a donné la plus complète définition lorsque, après avoir rapporté le verset de l’Évangile : « Jésus et la femme adultère demeurèrent seuls, » il ajoute : « seuls l’un en face de l’autre, — miseria et misericordia… » Oui, quand nous ne sentons plus en nous que la misère, il est bien vrai qu’alors la miséricorde apparaît, si vraiment nous l’avons appelée par le seul mérite qui la suscite : le tourment de son absence ! Cet état de sécheresse, qui faisait de la foi, pour Jean Monneron, suivant son mot expressif, « une probabilité morte, » s’attendrissait, se fondait durant cette veillée fraternelle. Pour la première fois peut-être, il ne résistait pas à cette action de Dieu, si souvent ébauchée en lui, et elle s’achevait en un appel vers une consolation qui ne pouvait lui venir ni des autres ni de lui-même. Il ne se heurtait plus à aucun raisonnement critique, à aucun morbide scrupule, comme il en avait tant eu, quand, par exemple, derrière son besoin de croire, il devinait un désir caché d’épouser celle qu’il aimait. Sa volonté, brisée et vaincue, s’abandonnait à l’inconcevable puissance, principe de tout l’univers et de notre cœur aussi, puisque ce cœur est un fait au même titre qu’un autre. Jean la sentait vivante, cette puissance, puisque notre vie y plongée, — intelligente, puisque la pensée en
Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/453
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
441
LE PÊRE ET LE FILS