— « Que lui diras-tu ? » continua-t-elle.
— « Que ses assiduités ici te compromettent, et qu’il les cesse. »
— « Soit… » répliqua-t-elle, après un silence. « Mais, si tu veux que je croie que tu agis vraiment par affection pour moi, il faut que tu me fasses une promesse, celle de me rapporter ce qu’il t’aura répondu, franchement, brutalement, complètement. Tout mon avenir tient peut-être dans cette réponse… Oui, » insista-t-elle, « tout mon avenir… » Elle eut une seconde d’hésitation, puis, avec une fermeté semblable à celle de son frère, elle ajouta : « parce que je l’aime… »
— « Tu l’aimes ? « répéta Jean, comme accablé de cette confidence, qui corroborait pourtant la moins douloureuse des hypothèses qui le hantaient sur l’intimité des deux jeunes gens. Pas une seconde, il n’eut l’idée de traduire ces deux mots dans un sens de liaison coupable. Il n’y vit que l’aveu d’un sentiment caché et que la jeune fille n’avait jamais déclaré à celui qui l’inspirait. « Ma pauvre Julie, à quoi cela te mènera-t-il ? Tu n’as pas la folie de croire que le comte de Rumesnil va épouser mademoiselle Monneron ?… »
— « Et pourquoi pas ? » fit-elle vivement. « Je ne dis pas tout de suite ! Sa mère peut avoir des préjugés. S’il en avait, lui, il ne serait pas de l’Union Tolstoï. Tout dépend de ce qu’il sent pour moi. C’est ce que je saurai par la conversation que vous allez avoir ensemble. C’est ton devoir de me la rapporter complètement, je te le répète. Me le