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L’ÉTAPE

texte de causer avec Jean, alors qu’il sait parfaitement que Jean n’y est pas, et qu’il reste une heure à bavarder, avec qui ? Je te le demande. Et s’il ne t’aime pas, je te demande encore quelle raison il avait de t’attendre au coin de la rue Lhomond et de la rue Amyot, l’été dernier, quand tu allais encore à ton collège ? Et toi, tu avais bien soin de prendre toujours par là, comme par hasard, au lieu d’aller tout droit par la rue d’Ulm et la rue Gay-Lussac. Ne dis pas non. Je vous ai vus marcher ensemble, tout comme tu as vu Jean et Mlle Ferrand. Seulement, » et il ricana, « avec vous, il manquait le père… Enfin, vous vous êtes si peu cachés, que même ce benêt de Jean s’est aperçu de quelque chose. Il m’en a parlé, pas plus tard qu’aujourd’hui. Je lui ai répondu, ce que je pense, que tu es parfaitement dans ton droit de vouloir un jour mettre sur tes cartes : Comtesse Adhémar de Rumesnil, et j’ai l’idée que la maman Monneron n’en serait pas fâchée non plus. Sans cela, elle n’aurait pas toujours à donner un ordre dans une autre partie de l’appartement, quand Adhémar est au salon… Peut-être serait-elle moins indulgente, pourtant, si elle savait que vous ne vous contentez pas de ces tête-à-tête familiaux. Car vous en avez d’autres, et, par-dessus le marché, une correspondance… Entre parenthèses, quand tu voudras charger quelqu’un de mettre tes lettres à la poste, qui ne bavarde pas, donne-les-moi plutôt qu’au jeune Gaspard, et quand tu voudras en recevoir dont l’écriture soit déguisée, dis à ton correspondant