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L’ÉTAPE

avait dû être son but en compensant ainsi, à si peu de jours de distance, les sommes prises, avec cette exactitude ? Évidemment de maintenir le total du dépôt au même chiffre. En résumé, quelqu’un avait emprunté, par deux fois, pour moins d’une semaine, une assez grosse somme, et à qui ? au client du bureau le plus souvent absent de Paris, le moins habitué à vérifier ses comptes, et quand il le faisait, toujours simplement par le total. Devant ce vol exécuté de la sorte et suivi presque aussitôt de restitution, Berthier se dit : « C’est un de mes jeunes gens qui a fait le coup, et pour jouer. Il a essayé une seconde fois avec une somme plus forte, il a gagné de nouveau et de nouveau remis l’argent. Il a essayé une troisième fois avec une somme encore plus forte, et il a perdu, ou bien le retour inopiné de M. La « Croix a devancé la restitution. » La voilà, l’hypothèse qui expliquait tout. Suis toujours. Ce sont les jeunes gens du bureau qui timbrent les carnets de chèques des clients. Ces carnets sont de vingt-cinq et de cinquante chèques. Quoi de plus facile que de détacher un chèque en blanc avant de remettre le carnet au client, qui croira ensuite, comme M. La Croix, à sa propre distraction ? D’autre part, le détour imaginé pour faire entrer et sortir l’argent sans complices, mécaniquement, par une autre banque, sous un faux nom, révélait, je parle encore d’après M. Berthier, un professionnel. Une objection se présentait pourtant : un professionnel ne pouvait pas ignorer que les clients