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L’ÉTAPE

effet plus décourageante qu’elle n’est poignante. On comprend, à regarder ces individus attablés dans ces débits ou ces restaurants, que l’ouvrier français ne constitue pas, comme le racontent les boniments des politiciens, une classe à part. Si c’est un jour de chômage, tel que celui-là, cet ouvrier est vêtu comme un bourgeois. Les cigarettes qu’il fume sont celles que le bourgeois achète pour les mêmes trente centimes, dans les mêmes bureaux de tabac. Les portions qu’il mange chez le petit traiteur sont pareilles aux mets que le bourgeois commande à sa cuisinière. Il les arrose du vin que boit le bourgeois, il se procure les mêmes dyspepsies avec le même café et le même petit verre. Les journaux qu’il lit sont les mêmes, les mêmes embryons d’idées qu’il échange avec ses commensaux. La seule différence est dans le décor. La table du marchand de vins n’a pas de nappe et quelquefois pas de serviettes. Il ne suffit pas de telles misères pour établir entre la blouse et la jaquette cette ligne de démarcation que les socialistes se sont solennellement donné mission d’effacer. Et cette première évidence se double vite d’une autre. L’ouvrier français n’est pas non plus ce que ses flatteurs prétendent : l’être fruste et intact, le primitif en qui dorment des réserves de force, de quoi rajeunir notre société vieillie et en réparer la décadence. Cet ouvrier n’est pas un barbare. C’est un civilisé de médiocre espèce, arrivé, sauf exception, au plein développement qu’il peut supporter. Il n’y a lieu ni de