Page:Patriotisme et internationalisme.djvu/21

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Non, messieurs, la solution n’est pas là. Elle est, non seulement pour ceux qui sont séparés de nous, mais pour tous les autres peuples de la conquête, elle est dans le développement de la liberté politique et de la justice sociale en Europe.

Ah ! il n’y a aucun rapport entre l’Alsace-Lorraine qui sent battre à côté d’elle, comme un grand cœur qui ne s’arrêtera jamais, le peuple dont elle a été retranchée violemment, et cette Irlande qui n’a aucun point d’appui national hors d’elle-même, ou cette Pologne démembrée qui serait morte depuis longtemps si la vie profonde des peuples avait besoin d’un organisme visible pour subsister silencieusement.

Et pourtant même pour ces absorbées, même pour ces démembrées, même pour ces dévorés se préparent à l’heure présente et s’accomplissent les lentes réparations, par le seul progrès des libertés générales.

M. Gauthier (de Clagny). C’est trop long et nous ne voulons pas attendre si longtemps.

Jaurès. À mesure que les gouvernements ont à compter de plus en plus avec la force de l’opinion, à mesure surtout que le suffrage universel se développe sur l’Europe — il a conquis la Belgique, demain il va conquérir l’Autriche-Hongrie, ailleurs peut-être il s’introduira sous d’autres formes — tous les groupes d’intérêts, tous les groupes de sympathie, toutes les idées, toutes les forces d’un peuple sont appelées à la vie publique et à la vie légale et même les conquis deviennent une force devant laquelle le conquérant est forcé de capituler parfois, avec laquelle il est obligé de compter toujours, et les