Page:Patriotisme et internationalisme.djvu/14

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Jaurès. Et pourtant, dans cet immense et commun amour de la paix, les budgets de la guerre s’enflent et montent partout d’année en année, et la guerre, maudite de tous, redoutée de tous, réprouvée de tous, peut, à tout moment, éclater sur tous.

D’où vient cela ? Au risque de vous paraître affligé de la plus cruelle monotonie, je dois dire ici tout d’abord qu’elle est, selon nous, la raison profonde de cette contradiction, de ce perpétuel péril de guerre au milieu de l’universel désir de la paix. (Mouvements divers). Tant que, dans chaque nation, une classe restreinte d’hommes possédera les grands moyens de production et d’échange, tant qu’elle possédera ainsi et gouvernera les autres hommes, tant que cette classe pourra imposer aux sociétés qu’elle domine par sa propre loi, qui est la concurrence illimitée, la lutte incessante pour la vie, le combat quotidien pour la fortune et pour le pouvoir ; tant que cette classe privilégiée, pour se préserver contre tous les sursauts possibles de la masse, s’appuiera ou sur les grandes dynasties militaires ou sur certaines armées de métier des républiques oligarchiques ; tant que le césarisme pourra profiter de cette rivalité profonde des classes pour les duper et les dominer l’une par l’autre (Applaudissements à l’extrême gauche), écrasant au moyen du peuple aigri les libertés parlementaires de la bourgeoisie, écrasant ensuite au moyen de la bourgeoisie gorgée d’affaires le réveil républicain du peuple ; tant que cela sera, toujours cette guerre politique, économique et sociale des classes entre elles, des individus entre eux, dans chaque nation, suscitera les guerres armées entre les peuples. (Très bien ! très bien ! sur divers bancs). C’est de la division profonde des classes et des inté-