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Il était bien évident que, tant que le mécanisme commercial enserrerait ces coopératives, elles ne pourraient procéder à des distributions gratuites de pain et des aliments dont elles disposaient, que dans une trop modeste proportion. Il faut ajouter même, que si elles eussent pu faire davantage, c’eut été encore insuffisant pour rassasier une multitude aussi énorme.


À cette heure psychologique, qui allait décider de l’avenir du mouvement, le peuple eut l’intuition des nécessités inéluctables. Fut-ce simple instinct de conservation, ou réminiscence des théories sociales qui avaient pu être semées dans les cerveaux, y sommeiller et s’y épanouir brusquement, au moment fatidique ?

En tous les cas, il se produisit dans la classe ouvrière les mêmes phénomènes d’inspiration spontanée et d’audace féconde qui marquèrent l’aurore de la révolution de 1789 à 1793. Cette révolution, dont on a surtout exalté les aspirations politiques, fut illustrée d’actes qui dénotaient de profondes tendances sociales. Avant de se préoccuper de la forme du gouvernement, le peuple songeait à vivre. — et il s’en prenait aux riches, aux accapareurs. Dans les villes, dans les campagnes, incalculables furent les soulèvements sociaux : ici, des bandes prenaient d’assaut les magasins de blé et partageaient les approvisionnements qui s’y trouvaient ; là, d’autres bandes s’emparaient de la farine, la portaient au boulanger et, la cuisson faite, procédaient à la distribution du pain ; ailleurs, la foule