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toujours plus impétueuse. Et la nervosité ambiante, qui ne faisait que croître, était accentuée par le manque de nouvelles. Des rumeurs inquiétantes circulaient et l’anxiété et l’angoisse grandissaient à ces racontars qu’il n’était guère possible de vérifier.

Les journaux paraissaient moins que jamais. Les plus puissants, par les moyens financiers, arrivaient avec peine à faire sortir des feuilles rudimentaires, intermittentes.

La ville avait perdu son décor de luxe et de joie. Elle n’était plus la cité affairée, commerciale, manufacturière. Elle prenait des patines de nécropole — et en avait aussi les relents. Les frémissements qui l’animaient évoquaient le grouillement d’une décomposition interne. L’occupation militaire, qui lui donnait certains aspects de camp, n’effaçait pas cette impression de chose qui meurt. Ses rues étaient mornes et vides. Il ne persistait de circulation que dans les grandes artères, où déambulait une foule bigarrée d’ouvriers et d’employés désœuvrés, de bourgeois effarés.

Le va-et-vient des voitures était excessivement réduit : quelques fiacres, la plupart conduits par des cochers qui, en temps normal, maraudaient la nuit autour des gares et proche des établissements de plaisir ; quelques autos ayant au volant, non des professionnels, mais des amateurs, — jeunes bourgeois robustes qui, fiers de leurs biceps, portaient crâne.

La plupart des boutiques avaient baissé leurs devantures ; faisaient exception, restant entr’ouverts,