Page:Pataud, Pouget - Comment nous ferons la Révolution, 1909.djvu/23

Cette page n’a pas encore été corrigée

Le mot d’ordre se propagea, par vibrations spontanées, par accord tacite. Et c’est pourquoi, dès le lundi matin, le courant favorable à la grève était déjà important et la reprise du travail très partielle.


Bientôt les rues se sillonnèrent d’une foule nerveuse, en quête de nouvelles, se dirigeant vers la rue Grande-aux-Belles et la Bourse du travail et, surtout, ayant pour point d’attraction le théâtre de la tuerie, le coin des grands boulevards, où étaient tombées les victimes.

Tout le jour, on y pélerina. La coulée humaine dévalait, recueillie, émotionnée, sans que jaillissent d’autres cris que les appels des camelots offrant les dernières éditions des journaux. Lorsqu’il se faisait des remous de foule, quand des groupes se formaient, ils étaient aussitôt désagrégés par la police ; à son traditionnel « circulez », lancé avec une componction inaccoutumée, il était obéit à regret, rétivement. On eût dit que la foule s’éveillait d’un long engourdissement ; elle regardait les policiers comme un objet d’horreur sans avoir encore l’énergie de la résistance.

Dans la nuit, des gerbes de fleurs avaient été apportées et accumulées en pyramides, aux places tachées de sang. Les autorités, redoutant d’accroître la surexcitation populaire, les avaient laissées, se bornant à accentuer les mesures de police et à renforcer les postes de soldats, sur les chantiers et aux carrefours.


Les conseils des syndicats, les comités des fédérations