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Sur tous les produits, sur tous les objets que leur moins grande quantité obligeait à rationner, la part de chacun était théoriquement proportionnelle ; mais leur partage mathématique, outre qu’il était impraticable, eût été absurde et eût donné des résultats pitoyables. La répartition logique qu’on eût vainement cherchée par ce procédé, fut obtenue naturellement par le libre jeu des goûts particuliers, des préférences individuelles : les uns se portèrent vers tels produits, les autres vers tel objet et cette dispersion des désirs, cette variété des goûts, réalisa l’équilibre entre l’offre et la demande. Il fut loisible à chacun de satisfaire, en proportion équivalente à la richesse sociale, ses appétits de luxe.

Ce pouvoir égal de consommation, attribué indistinctement à tous, ne paraissait excessif qu’à ceux qui s’étaient tenus confinés dans le cadre étroit de la vie bourgeoise. Les autres, qui savaient quel travail d’élaboration préalable avait préparé — depuis le milieu du dix-neuvième siècle, — les réalisations actuelles, s’y pliaient, sinon avec joie, du moins sans trop grande acrimonie.

Il n’avait pas surgi brusquement, en effet, le sentiment d’égalité et d’équivalence des fonctions dont était saturée la classe ouvrière. Depuis longtemps ses militants — après avoir condamné les privilèges de la fortune, — enseignaient qu’un être humain n’acquiert pas, grâce au savoir, des droits supérieurs à ceux des autres hommes et qu’il n’a pas à réclamer une rémunération d’autant plus élevée qu’il est plus instruit ; ils démontraient que celui qui est pourvu d’instruction en est redevable à ses