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comment nous ferons la révolution

de police. La facilité de barrer l’étroite rue où était situé le Manège avait permis de rendre plus compacts les cordons de sergents de ville. Et, par excès de précaution, un filtrage rigoureux et d’une énervante lenteur contrariait l’évacuation de la salle.

La foule s’irrita de l’embouteillage qui lui était imposé. Comme un élément trop comprimé, elle se détendit brusquement et, en une poussée furieuse, elle disloqua les barrages policiers. Malgré leur carrure et leur nombre, les agents des brigades centrales furent refoulés et la sortie s’effectua plus rapide.

Les officiers de police, encolérés par l’échec de leurs précautions, ordonnèrent le ralliement et lancèrent leurs troupes au revers du flot populaire qui s’écoulait bruyant par la rue Saint-Antoine.

Les grévistes firent front à l’attaque et, en peu de temps, la bagarre dégénéra en échauffourée : quelques tables et chaises, prises aux terrasses des cafés, des planches, un tramway renversé, s’esquissèrent en barricade. La résistance ouvrière fut vive ; on se battit avec acharnement.

Tandis que ces incidents se déroulaient rue Saint-Antoine, une colonne de grévistes avait obliqué par la rue de Rivoli et se dirigeait vers les grands boulevards. Comme les quelques sergents de ville épars, non plus que les quelques postes de soldats gardant les chantiers déserts ou bivouaquant de ci de là, n’étaient de taille à lui barrer le chemin, elle y parvint sans obstacles.