Page:Pataud, Pouget - Comment nous ferons la Révolution, 1909.djvu/101

Cette page n’a pas encore été corrigée

été radieux, si — lorsqu’il pétrissait la glaise de ses lions, — il avait pu évoquer le spectacle qui allait se dérouler à leurs pieds : la revanche de 1871 !

Les officiers eussent voulu éviter le contact du peuple avec leurs soldats et faire ouvrir le feu à distance. Ils en furent empêchés par l’affluence de la foule qui, toujours plus dense, plus compacte, entourait leurs hommes, gênait leurs mouvements et qui, au lieu de se disperser aux ordres, enlisait davantage les soldats.

Maintenant, cette foule, où les femmes, les enfants, dominaient, de passive se faisait audacieuse : des objurgations s’en élevaient impérieuses et douces, faites de cris de pitié, de sanglots, d’appels à l’humanité, d’ardentes et haletantes prières, d’exhortations aux soldats à ne pas tirer sur les frères, les enfants, les maris…

Encore quelques pas et les grévistes qui avaient entonné l’Internationale et rugissaient le couplet des soldats et des généraux, allaient joindre la foule et se trouver aux prises avec la troupe. Les officiers, qui sentaient celle-ci faiblir, s’amollir, commandèrent « baïonnette au canon ! »

Pour faciliter l’exécution de cet ordre, — et pour isoler la troupe de la multitude, — ils enjoignirent une brusque reculade de quelques pas. À ces commandements qui, de coutume, font se mouvoir machinalement les soldats, — comme des automates, — c’est à peine si quelques mouvements s’esquissèrent.

Des clameurs, exaspérées et furieuses, couvrirent les voix des chefs militaires, annihilant leur influence ; des imprécations et des malédictions fusèrent