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enrichir les églises. » Pauper remansit fiscus noster ; divitiæ nostræ ad ecclesias sunt translatæ. Il ne s’en plaignoit pas comme ami des pauvres, et privé d’un moyen de plus de les secourir, en voyant ses sujets supporter, par la multiplicité même et l’étendue de ces exemptions ; μηε contribution plus forte ; c’étoit son fisc à lui, fiscus noster. Du reste, un diplôme de Chilpéric défendit aux testateurs d’instituer l’église leur héritière générale. Mais, comme l’a dit Henrion de Pansey[1], cette défense, qui n’empêchoit ni les dons entre-vifs, ni les legs particuliers, ne fut pas même une barrière contre les institutions universelles. Grégoire de Tours nous apprend d’ailleurs[2] que le diplôme de Chilpéric fut révoqué par le prince qui lui succéda[3].

L’abbaye de Saint-Denis est une des premières qui reçurent de grandes immunités[4] ; elle les dut à Dagobert, fils de Clotaire II, et la concession est de la dixième année de son règne[5]. Childebert, vers la même époque, envoya dans la ville de Poitiers deux commissaires, un Maire et un Comte du palais, pour faire une nouvelle description du cens que le peuple avoit payé pendant le règne de Sigebert, son père. Plusieurs des anciens débiteurs étoient morts, et le fardeau du tribut, resté le même, accabloit les veuves, les orphelins, des personnes également sans moyens et sans ressources. Les commissaires du Roi firent une recherche exacte des changemens survenus ; les pauvres et les foibles furent déchargés, et l’impôt fut borné à ceux qui devoient le supporter dans les règles de la justice[6]. Du temps du Roi Clotaire, la ville de Tours avoit été marquée pour être assujettie au tribut, et Clotaire y avoit d’abord donné sa sanction ; il la retira ensuite. Charibert, devenu son souverain, avoit juré de la laisser dans l’état où elle étoit sous son père, et de ne proposer, relativement à ses habitans, aucun règlement nouveau qui pût tendre à leur faire payer des tributs ; un commissaire en exigea cependant au nom du Prince, qui fit au contraire jeter au feu le registre où se trouvoit le détail des contributions que l’on proposoit d’exiger. Sigebert, successeur de Charibert, ne forma aucune réclamation semblable. Childebert régnoit depuis quatorze ans quand Grégoire de Tours écrivoit, et Tours n’avoit encore gémi sous aucune espèce de tribut. Des commissaires encore voulurent, armés d’un registre ancien, réclamer l’impôt : un diplôme de Childebert déclara que, pour le respect

  1. Dissertations féodales, tome I.er, page 129.
  2. Livre VII, §7.
  3. Clotaire II
  4. D’autres disent l’église de Saint-Vincent, depuis Saint-Germain des Prés. Aimoin, liv. III, chap. ii. Du Breul, Antiquités de Paris, liv. XXI. Félibien, Hist. de Paris, p. 30. Le Cointe, Annales ecclésiastiques, tome I.er, p. 842.
  5. §30 de la vie de ce prince. Il mourut au mois de janvier 638.
  6. Grégoire de Tours, ibid.