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l’une ou l’autre des deux images de la bougie dont nous venons de parler : 1o  il n’y aura pas toujours bifurcation du rayon ; 2o  quand il y aura bifurcation, les deux nouvelles images n’auront pas la même intensité. La lumière qui a traversé un cristal biréfringent est donc différente de la lumière naturelle ou directe. Cela posé, Malus prouva que la modification imprimée à la lumière par la double réfraction était identique à celle que produit la réflexion à la surface des corps opaques ou diaphanes ; en d’autres termes, que les deux rayons ordinaire et extraordinaire, donnés par un cristal biréfringent, sont des rayons polarisés.

Malus établit si nettement, dès l’origine, ces fécondes découvertes, avec tant de mesure et tant de précision dans les faits et le langage, que l’on croirait, en lisant ses mémoires, qu’ils sont rédigés d’hier. Mais il ne put suivre son œuvre : une mort prématurée l’emporta, en 1812, à l’âge de trente-sept ans. Heureusement pour la science, deux physiciens célèbres, jeunes alors et pleins d’activité, MM. Biot et Arago, recueillirent son héritage, et ne tardèrent pas à s’illustrer par de brillantes découvertes dans la voie nouvelle que Malus venait d’ouvrir à la science.

En 1811, Arago reconnut que, lorsqu’un rayon polarisé traverse normalement une lame de cristal de roche taillée perpendiculairement à son axe, si l’on analyse le rayon, à sa sortie de la lame, à l’aide d’un rhomboïde de spath d’Islande, il donne constamment deux images dans toutes les positions du rhomboïde, et de plus, ces deux images sont colorées de teintes complémentaires. Lorsque l’épaisseur du spath ne permet pas une séparation entière des deux faisceaux, l’image est blanche là où ils se superposent en partie.

Cette expérience accusait une double anomalie aux lois ordinaires des cristaux biréfringents. Tout autre