Page:Pasteur - Recherches sur la dissymétrie moléculaire des produits organiques naturels, 1860.djvu/28

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Cela posé, il eût été assurément bien étonnant que la nature, si variée dans ses effets, et dont les lois permettent l’existence de tant d’espèces de corps, ne nous eût pas offert, dans les groupes atomiques des molécules composées, l’une et l’autre de ces deux catégories dans lesquelles se distribuent tous les objets matériels. Il eût été bien extraordinaire, en d’autres termes, que parmi toutes les substances chimiques, naturelles ou artificielles, il n’y eût pas des individus à image superposable et d’autres à image non superposable.

Les choses se passent en effet comme il est naturel de les prévoir ; toutes les combinaisons chimiques sans exception se distribuent également en deux classes ; celles à image superposable, et celles à image non superposable.

II.

Il est facile de montrer que c’est là une conséquence légitime, obligée de notre première conférence. Pour la mettre dans tout son jour, je rappellerai brièvement les conditions principales de l’expérience décisive par laquelle nous avons terminé la précédente leçon.

Je prépare à l’aide de l’acide paratartrique naturel, le paratartrate de soude et d’ammoniaque. Il se dépose de beaux cristaux.

Si l’on observe dans l’appareil de polarisation la solution d’une portion quelconque de ce sel double, elle n’offre aucun indice de déviation optique ; et en séparant des cristaux l’acide qu’ils renferment, on reproduit l’acide paratartrique, identique à celui qui a servi à les former. Jusque-là tout est simple et naturel et l’on croit avoir affaire à la cristallisation d’un sel ordinaire. Il n’en est rien cependant.