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propre à des matières liquides ou solides, qu’enfin le vibrion n’est pas seulement un épiphénomène de la maladie dont il est le compagnon obligé. Or, que voyons-nous dans les résultats que je viens de faire connaître ? nous voyons un liquide septique, pris à un certain moment, alors que les vibrions ne sont pas encore transformés en germes, perdre toute virulence par le simple contact de l’air, conserver au contraire cette virulence, quoique exposé à l’air, à la seule condition d’avoir été en épaisseur pendant quelques heures. Dans le premier cas, après perte de la virulence au contact de l’air, le liquide est incapable de reprendre celle-ci par la culture ; mais dans le second cas il conserve et peut propager de nouveau cette virulence, même après qu’il a été exposé au contact de l’air. Il n’est donc pas possible de soutenir qu’en dehors et à côté du vibrion adulte ou de son germe il y ait une matière virulente propre, liquide ou solide. On ne peut même pas supposer une matière virulente qui perdrait sa virulence juste en même temps que périt le vibrion adulte ; car cette prétendue matière devrait également perdre sa virulence lorsque les vibrions transformés en germes sont exposés au contact de l’air. Puisque dans ce cas la virulence persiste, celle-ci ne peut être que le fait de la présence exclusive des corpuscules-germes. Il n’y a qu’une hypothèse possible pour l’existence d’une matière virulente à l’état soluble, c’est qu’une telle matière, qui serait en quantité insuffisante pour tuer dans nos expériences d’inoculation, serait incessamment fournie par le vibrion lui-même pendant qu’il est en voie de propagation dans le corps de l’animal vivant. Mais qu’importe, puisque cette hypothèse suppose l’existence primordiale et nécessaire du vibrion.

Elle a été faite, cette supposition, et pour la confirmer des travaux sans nombre ont été entrepris de l’autre côté du Rhin.

Le docteur Panum, aujourd’hui professeur à Copenhague, et à sa suite un grand nombre de physiologistes allemands, se sont arrêtés à l’idée que la putréfaction développe dans les matières qui s’y trouvent soumises un poison soluble que ni la coction ni une distillation répétée pendant plusieurs heures ne peuvent atteindre dans ses propriétés, pas plus que des réactions chimiques de cet ordre ne sauraient supprimer les effets de la morphine ou de la strychnine. Ce poison chimique