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FERMENTATION ET GÉNÉRATIONS DITES SPONTANÉES

plusieurs autres, par des recherches inexactes, obscurcirent l’étude de ses propriétés, ce qui fut cause que Braconnot décrivit en 1813 comme nouveau, et sous le nom bizarre d’acide de Nancy ou acide nancéique, un produit qui n’était autre que l’acide lactique de Scheele. Quoi qu’il en soit, le travail de Braconnot est l’un des mieux faits parmi les nombreux Mémoires auxquels cet acide a donné lieu. Il le rencontra dans le riz abandonné sous l’eau en fermentation ; dans le jus de betterave qui, après avoir éprouvé la fermentation visqueuse et un mouvement de fermentation alcoolique, s’aigrit et donne de l’acide lactique et de la mannite ; dans des haricots et des pois bouillis à l’eau fermentée ; dans une eau sûre faite avec du levain de boulanger ; enfin dans le lait aigri et dans l’acide lactique de Scheele[1].

La composition de l’acide lactique fut établie par MM. Pelouze et J. Gay-Lussac, en 1833[2]. Plus tard, en 1881, MM. Fremy et Boutron[3] publièrent un travail qui mérite une mention spéciale dans l’histoire de ce corps, parce qu’ils y font connaître le moyen de prolonger l’action des matières organiques azotées sur les sucres, de façon à transformer plus complètement ces derniers en acide lactique. Ils ont remarqué que l’action du caséum était arrêtée par l’acide lactique lui-même, et en saturant le liquide de temps à autre par le bicarbonate de soude, ils ont pu transformer tout le sucre du lait. MM. Pelouze et Gélis[4] ont fait mieux : ils ont ajouté de la craie à l’eau sucrée et au ferment. La craie maintient constamment la neutralité, sans que l’opérateur ait à exercer aucune surveillance. Alors on a pu, en reprenant les expériences de Braconnot et imitant celles de M. Colin sur la fermentation alcoolique, faire fermenter lactiquement le sucre à l’aide de toutes les matières plastiques azotées. Aussi les conditions matérielles de la préparation et de la production de l’acide lactique sont bien connues des chimistes. Tout le monde sait aujourd’hui qu’en

    chaux. Il évapora la liqueur en consistance de miel. L’acide épaissi fut redissous dans l’alcool rectifié, ce qui élimina le sucre de lait et beaucoup d’autres matières étrangères. La distillation chassa l’alcool. (BOUILLON-LAGRANGE. Annales de chimie, an XII, L, p. 288 ; d’après SCHEELE, Mémoire sur le lait ou son acide, ou acide galactique, in : Mémoires de chimie, Dijon et Paris, 1785, in-12, seconde partie, p. 51-68.

  1. BRACONNOT. [Expériences sur un acide particulier qui se développe dans les matières acescentes]. Annales de chimie, LXXXVI, 1813, p. 84-100 ; — VOGEL. [Note sur la formation de l’acide lactique pendant la fermentation]. Journal de pharmacie, III, 1817, p. 491-493 ; — BERZELIUS. [Sur l’acide lactique]. Annales de chimie et de physique, XLVI, 1846, p. 420-428 ; — ont reconnu que l’acide lactique était un acide particulier.
  2. GAY-LUSSAC et PELOUZE. [Sur l’acide lactique], Annales de chimie et de physique, 2e sér., LII, 1833, p. 410-424.
  3. BOUTRON et FREMY. [Recherches sur la fermentation lactique]. Annales de chimie et de physique, 3e sér., II, 1841, p. 257-274.
  4. PELOUZE (J.) et GÉLIS (A.). Mémoire sur l’acide butyrique. Comptes rendus de l’Académie des sciences, XVI, 1843, p. 1262-1271. (Note de l’Édition.)