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l’animal tombe sur le côté et il asphyxie sans changer de place, à moins qu’il ne soit agité de convulsions qui m’ont paru être des convulsions d’agonie par asphyxie. Nous les avons vues se reproduire à peu près semblables en asphyxiant des lapins dans le gaz acide carbonique. Enfin, les poils des lèvres et des joues sont fréquemment mouillés de salive après la mort. En résumé, par ces seuls symptômes nous pouvons déjà pressentir que nous devons avoir affaire à une maladie virulente toute nouvelle.

L’Académie n’a pas oublié que, dans les recherches que je poursuis depuis plusieurs années, concernant les maladies transmissibles, ma principale préoccupation est de découvrir celles d’entre elles que l’on doit considérer comme déterminées par la présence exclusive d’organismes microscopiques et d’en fournir une démonstration irréfutable. Nous devions donc porter toute notre attention sur l’état des liquides pendant la vie et après la mort. Chose digne de remarque : il nous fut bientôt démontré que, soit que le sang ou la salive amènent la mort, le sang des animaux est envahi par un organisme microscopique dont les propriétés sont fort curieuses.

Cet organisme est parfois si petit qu’il peut échapper a une observation superficielle. Sa forme lui est commune avec celle de beaucoup d’autres êtres microscopiques : c’est un bâtonnet extrêmement court, un peu déprimé vers son milieu, en forme de 8, par conséquent, dont le diamètre de chaque moitié ne dépasse pas souvent 1 demi-millième de millimètre[1]. Chacun de ces petits articles est entouré, pour un certain foyer, d’une sorte d’auréole qui correspond peut-être à une matière propre. Sans doute, en donnant une position convenable à la lentille de l’objectif du microscope, on peut ordinairement voir se dessiner, autour des organismes de la taille de celui dont nous parlons, une plage un peu lumineuse. C’est un effet de diffraction ; mais dans le cas actuel il semble vraiment que l’auréole soit produite par une substance muqueuse, une sorte de gangue au sein de laquelle vraisemblablement se formerait le petit organisme, par un procédé analogue à celui qui donne naissance aux corpuscules de la pébrine des vers à soie. Quoi qu’il en soit de cette opinion, qui devra être étayée d’observations ultérieures, il est certain que, dans quelques cas où le petit organisme a été difficile à distinguer, la recherche de l’auréole a pu servir à le faire reconnaître.

J’ai hâte d’arriver à la question qui se pose toujours dans les obser-

  1. Depuis que nous le cultivons dans l’organisme il a un peu grossi. Son diamètre est plus voisin de 1 millième de millimètre.