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IIO LA CORNE D ABONDANCE. Porte le front cornu : le Pasteur de Latmie, S’estouit toutefois de l'auoir pour amie. Les astres, comme on dit ont receu grand plaisir De voir leur Roine en bas descendre à son desir. La maison de Pluton, des viuans tant haïe. Fut de ta corne blanche aise & bien esbaïe. Bacchus aus blonds cheueus, après que ta vertu. Du portier abboyant eut la rage abbatu, Et lors que les Titans entreprindrent la guerre Contre le Roi du ciel et maiftre du tonnerre, Au milieu de la peur, pour estre en seureté, Soubs les cornes d’un bouc cachant ta deïté. Bacchus, celuy ne craint ni guerre ni tempeste. Qui une fois a mis tes cornes en fa teste. Elles peuuent tous maus en tous temps enchanter : Elles sont en leur dueil les plus tristes chanter : Toi, deesse du Nil, fameus fleuue aus sept portes. Vn beau croissant cornu sur la teste tu portes, De vache estant Isîs : en despit de Iunon Les cornes t’ont acquis un immortel renom. Ainsi qu’à ton Apis, deuant Apis se courbe Dévote en oraisons la Pharienne tourbe. Quoi ? les liquides dieus qui gouuernent les eaux. Ne portent-ils les chefs semblables aus Taureaus ? Neptune en ceste forme a bien changé la sienne Pour mieus assubiectir la vierge AEolienne. Achelois à bon droit s’appelle infortune D’auoir esté iadis par Hercule escorné: Bien que vostre brigade, o Nymphes, soit repue De l'Automne qui sort de sa corne rompue. Pourquoi sont, je vous pri’, les fourmis Indiens De tant de mines d’or les riches gardiens ? Pour ce qu’ils font cornus : Si les cornes leur faillent Il faudra, malheureus, que toujours ils trauaillent,