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pensée de cette éternité qui les attend, comme s’ils la pouvaient anéantir en n’y pensant point. Elle subsiste malgré eux, elle s’avance, et la mort qui la doit ouvrir les mettra infailliblement dans peu de temps dans l’horrible nécessité d’être éternellement ou anéantis, ou malheureux.

Voilà un doute d’une terrible conséquence ; et c’est déjà assurément un très grand mal que d’être dans ce doute ; mais c’est au moins un devoir indispensable de chercher quand on y est. Ainsi celui qui doute et qui ne cherche pas est tout ensemble et bien injuste, et bien malheureux. Que s’il est avec cela tranquille et satisfait, qu’il en fasse profession, et enfin qu’il en fasse vanité, et que ce soit de cet état même qu’il fasse le sujet de sa joie et de sa vanité, je n’ai point de termes pour qualifier une si extravagante créature.

Où peut-on prendre ces sentiments ? Quel sujet de joie trouve-t-on à n’attendre plus que des misères sans ressources ? Quel sujet de vanité de se voir