lorsqu’il parle du cœur de Pascal, trop oublié dans les disputes qui s’étaient élevées sur ses idées. Du reste, suivant l’esprit habituel de sa critique et de son livre, il ne s’attache pas à la partie historique et personnelle de son sujet, mais à sa partie générale et humaine : il prend Pascal comme ayant représenté, au plus beau moment de la plus belle des langues modernes, un certain ordre d’idées et de sentiments humains dont il a rencontré l’expression la plus lumineuse et la plus sublime. M. Nisard a mis dans ces observations sa fine et sévère analyse, sa précision magistrale, et surtout cette distinction qui me parait son ambition principale et son principal caractère ; car c’est un talent qui ne souffre rien de commun, quoiqu’il n’admette rien que d’universel.
Mais le travail le plus étendu et le plus approfondi à la fois qui ait été fait sur Pascal est celui de M. Sainte-Beuve. Ce n’est plus une courte étude, un chapitre d’histoire littéraire, ou le large développement d’un seul point de vue ; c’est Pascal étudié à loisir dans sa vie et dans sa pensée, avec cette longue patience qui en tout genre fait les monuments[1]. Toutes les qualités d’un esprit merveilleusement doué pour la critique concourent dans ce livre : une finesse incroyable, qui n’est que l’extrême justesse et l’extrême sagacité, et à laquelle aucun repli n’échappe ; et eu même temps une vue d’en haut, et à vol d’oiseau, pour ainsi dire, qui embrasse très-bien l’ensemble, saisit tout de suite ce qui est dominant, et subordonne les détails ; une richesse de littérature et de connaissances qui féconde tout, fournissant partout des développements, des rapprochements, des contrastes ; l’esprit le plus philosophique sans aucune prétention de philosophie, dégagé de tout préjugé
- ↑ Voyez tout le livre III de Port-Royal, tomes ii et iii.