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ARTICLE VI.
50.

Ce chien est à moiErreur de référence : Balise <ref> incorrecte : les références sans nom doivent avoir un contenu., disaient ces pauvres enfants ; c’est là ma place au soleil. Voilà le commencement et l’image de l’usurpation de toute la terre.

51.

« Vous avez mauvaise grâce, excusez-moi, s’il vous plait. «  — Sans cette excuse, je n’eusse pas aperçu qu’il y eût d’injure. — « Révérence parler[1]… » — Il n’y a rien de mauvais que leur excuse.

’o Ce chien esta moi. » En litre dans le manuscrit : J/i’en, lien. L effrayante hardiesse de celte pensée a été relevée par l’auteur du Génie du Chrisliaiiisme dans le chapitre sur Pascal (troisième partie, liv. II. chapitre 6). il a raison de dire que Rousseau, en s’en inspirant, ne la pas égalée : « Le premier qui, ayant enclos un terrain, s’avisa de dire : Ceci » e>l à moi, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, de » guerres, de meurtres, que de misères et d’horreurs n’eût point cpargués au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant le fossé, » eût crié à ses semblables : Gardez-vous d’écouter cet imposteur ; vous » êtes perdus si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre » n’est à personne. » Rousseau fait bien moins [leur, en criant et en s’agitant, que Pascal dans son analyse froide et méprisante. L’un s’indigne contre l’usurpation et la menace, il appelle sur ceux qui possèdent toutes les colères qui ont si fort éclaté depuis ; l’autre n’a point de colère contre les possesseurs, il ne les voit pas, il no voit que ces pauvres enfants qu’il prend en pitié. « Et voilà, dit encore le Génie du Christianisme, une do » ces pensées qui font trembler pour Pascal. Quoi ne fut point devenu ce » grand homme, s’il n’avait été chrétien ? >.• On se demande comment les éditeurs de P. R. ont osé conserver un tel passage ; n’en auraient-ils pas compris toute la portée, que nous sentons si b ; en aujourd’hui ? Cependant ne nous troublons pas : des esprits bien lumineux ont porté du jour dans ces ténèbres où le lien et le mien ont leurs origines ; ils ont montré que l’homme s’approprie les choses en mettant dans les choses une part de lui-même qui les fait siennes, son activité libre et son travail. Oui, ce chien peut être à cet enfant, si cet enfant s’est fait suivre de ce chien, s’il l’a apprivoisé et dressé. Cette place au soleil sera bien sa place, si c’est lui qui l’a trouvée, ménagée, rendue commode, ou si ses camarades la lui défèrent un jour qu’il se sera battu pour eux. Ce n’est pas dans une note que nous pouvons creu.ser ces problèmes ; mais tant qu’on dira toi et moi, nous croyons qu’il faudra dire aussi tien et mien. Qui veut supprimer la propriété devra supprimer la personne. Cf. m, 1 2 ; vi, 7.

  1. « Révérence parler. » Locution dont on se sert quand on parle « de