tum, de créer une rente pour un an, en sorte qu’au bout de l'an, celui qui a pris, par exemple, dix-huit mille livres, soit obligé d’en rendre dix-neuf mille. Mais il n’y eut jamais de fausseté plus hardie que celle qu’ils commettent en citant Gerson, comme ayant enseigné cette doctrine
dans son Traité des contrats.
« Gerson, dit-il, est un des premiers qui, en la seconde partie de ses œuvres au traité De contract. (prop. XIX), dit que les rentes qui peuvent se vendre à perpétuité, peuvent pareillement se vendre pour un temps limité, tant à l’égard du vendeur que de l'acheteur, pourvu que la même matière se trouve dans le contrat à perpétuité, et dans celui qui se fait pour un temps. » Voilà ce qu’ils font dire à Gerson, n’ayant pour le prouver que ces paroles qu’ils rapportent, mais qui n’ont, en aucune sorte, le sens qu’ils y donnent : « Omnis contractus quo licite venduntur vel emuntur reditus perpetui, potest similiter esse licitus, si eodem contractu similiter se habente, detur facultas mutua redimendi præsertim in foro conscientæ. »
Car, pour bien comprendre la doctrine de Gerson dans tout ce traité, il faut remarquer qu’anciennement les rentes étoient non rachetables, et que c’est en ce sens qu’on les appeloit perpétuelles ; mais qu’environ le temps de Gerson, on commença à les rendre rachetables comme elles sont aujourd’hui. C’est ce que Gerson appelle : « Venditio redditualis, quœ « potest redimi, » ou « Venditio census perpetui cum facultate redimendi.»
Mais cette faculté de racheter étoit de deux sortes ; car quelquefois on marquoit un temps préfix, comme de dix ans, pendant lequel celui qui avoit pris de l'argent à rente pouvoit la racheter en rendant l’argent, mais après lequel il ne pouvoit plus la racheter. Et c’est ce que Gerson appelle, en plusieurs lieux de ce traité : « Facultas redimendi ad certum tempus. » L’autre manière est celle qui s’observe maintenant, qui est que celui qui avoit pris de l’argent à rente, pouvoit la racheter quand il lui plaisoit ; ce qui est appelé, dans Gerson, « Facultas redimendi toties quoties. »
Voilà tout ce que Gerson autorise, et encore avec beaucoup de modération : et c’est une imposture visible d’alléguer, ainsi que font les jésuites, comme ayant approuvé une palliation d’usure aussi manifeste qu’est leur cens constitué pour un an, ou que celui qui l’a acheté ait droit de revendre au bout d’un an : en sorte que celui qui l’a vendu soit obligé de rendre l’argent qu’il a pris, avec une année d’intérêt.
Cela paroît : 1° parce que Gerson parle toujours de la faculté de racheter, qui ne se donne jamais qu’au vendeur ; et jamais de la faculté de revendre, qui se donneroit à l’acheteur. Or, dans la constitution des rentes, celui qui prend de l’argent à rente est l’acheteur, et celui qui le donne est le vendeur ; et, par conséquent, la faculté dont parle Gerson étant une faculté de racheter, et non de revendre, elle ne peut que donner droit à celui qui a pris de l’argent à rente de rembourser le fonds de la rente ; et non pas à celui qui l’a donné de se faire rendre son argent, lorsqu’on ne manque point de lui payer les arrérages.
2° Il fonde la justice de ces rentes rachetables (part. I, consid. V) sur ce que, dans l'ancienne loi, il étoit permis de vendre une mai-