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TROISIÈME ET QUATRIÈME FACTUM


jugement dans l’esprit, mais seulement de dépravation dans la volonté. Voici ses paroles (in 4, dist. XXV . quæst.5 , art.1) : « Sicut dicit philosophus quod Milesii stulti non sunt, sed operantur qualia stulti ; secundum hoc dicendum quod simoniaci non sunt proprie et per se loquendo hæretici, quum non habeantfalsarn opinionem : sed dicuntur hæretici propter similitudinem actus : quia ita operantu ac si æstimarent donum Spiritus sancti pecunia possideri, quæ æstimatio esset hæretica. »

Il n’est donc pas nécessaire, selon saint Thomas, de croire ou de vouloir que l’argent soit égal au don du Saint-Esprit ; ce qui est une folie, qui ne tombe en l’esprit de personne : mais il suffit d’agir comme si on le croyoit : ce que font, selon saint Thomas, tous ceux qui offrent de l’argent, comme un motif pour se faire donner les dignités de l’Église ; et tous ceux qui donnent des bénéfices, ayant pour motif principal d’en recevoir de l’argent, ou quelque autre chose temporelle.

La seconde, que, quoique saint Thomas se serve souvent des mots de vente, d'achat et de prix, pour expliquer en quoi consiste le crime de la simonie, il n’a jamais voulu néanmoins entendre autre chose par là, sinon donner une chose spirituelle, par le seul motif d’en recevoir une temporelle, ou bien donner une chose temporelle, afin d’obtenir, par ce moyen, une chose spirituelle. De sorte qu’un collateur, un patron ou un titulaire, qui donne un bénéfice à Pierre, seulement parce que Pierre lui a donné de l’argent, quelque volonté qu’il ait de ne point égaler cet argent qu’il reçoit au bénéfice qu’il donne, et encore qu’il n’y soit obligé par aucun pacte, il ne laisse pas de le vendre véritablement, et d‘être simoniaque devant Dieu.

Pour en donner des preuves décisives, il ne faut que considérer ce que dit saint Thomas (in 4, dist. XXV, quœst. 3, art. 3), où considérant les jugemens des juges ecclésiastiques comme des choses spirituelles, il demande si un juge ecclésiastique rendant une sentence en faveur de celui qui lui auroit fait un petit présent, seroit simoniaque. A quoi il répond en ces termes : « L’Église ne juge que selon ce qui paroit à l’extérieur : ainsi n'étant pas probable qu’un petit présent ait servi de motif à un juge ecclésiastique pour donner une sentence, elle ne juge pas que cet ecclésiastique qui a reçu un petit présent ait commis une simonie. Mais devant Dieu qui voit le cœur, soit que les présens soient grands ou, petits, c’est une simonie, s’ils ont servi de motif à ce juge pour donner une sentence : « Sed apud Deum qui cor videt, simonia est et in parvis en et in magnis rebus, si animus judicis ex eis flectatur. »

C’est par ce même principe qu’il conclut qu’un collateur qui donne un bénéfice ayant pour motif principal les prières qu’on lui a faites, et la faveur et les louanges qu’il en recevra, commet une simonie. Voici ses paroles au même lieu : « Qui dat aliquod spirituale pro favore vel laude acquirendâ, non est dubium quin simoniam committeret. Et ideò quandò preces fiunt pro indigno, quod nihil aliud movet nisi favor, manifestè simonia comittitur, si propter hoc beneficium ecclesiasticum detur. Si auteum pro digno fiant, quantùm ad judicium hominum a probabile est quòd dans magis moveatur intuitu dignitatis personœ, quàm favore precum ; et idéò non reparatur simonia. Si tamen princi-