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TROISIÈME ET QUATRIÈME FACTUM


d’un feu, et nous en défaire le plus promptement que nous pourrons. » Ce qu’il répète encore à la fin du chapitre : « Ayons soin, dit-il , autant qu’il nous est possible, d’éviter la conversation avec les femmes ; et, si cela ne se peut entièrement, il faut au moins que nos entretiens avec elles soient très-rares et très-courts. »

Voilà tout ce que dit saint Basile sur ce sujet ; et les jésuites ont si peu de conscience que de vouloir se servir de ses règles si saintes et si sévères, pour permettre à des débauchés d’aller faire des leçons de chasteté à des femmes perdues, encore qu’ils aient souvent reconnu, par une funeste expérience, qu’ils succombent à la tentation qu’ils vont chercher : « Etsi malo suo sæpe experti sunt, » comme dit le P. Bauny, « blandis se muliercularum sermonibus ac illecebris flecti solitos ad libidinem. »


III. Saint Ambroise faussement allégué sur le même sujet.


Ils n’abusent pas moins indignement de saint Ambroise, en nous renvoyant à ce qu’il dit, liv. III, chap. XV de ses Offices, où il ne fait autre chose que de louer Judith, laquelle, par une inspiration particulière de Dieu, qui l’assuroit de sa protection, comme remarque ce Père, alla tuer Holopherne au milieu de son camp. Car quel rapport y a-t-il de l’action toute miraculeuse et toute extraordinaire de cette sainte, avec les actions honteuses que les casuistes veulent autoriser par cet exemple ? Ils parlent de personnes qui ont reconnu, par leur propre expérience, que ces occasions les perdent et les font tomber dans le péché mortel. Peut-on penser la même chose de Judith, dont l’Écriture loue si hautement la chasteté ? Mais qui ne sait, de plus, que ces sortes d’actions des saints, qui n’ont été entreprises que par des mouvemens singuliers de l’esprit de Dieu, ne peuvent autoriser des actions semblables qui seroient faites sans ce mouvement, parce que l’esprit de Dieu, qui les poussoit et leur donnoit une confiance presque certaine en son secours, faisoit que ces actions, quelque périlleuses qu’elles fussent en elles-mêmes, ne l’étoient point à leur égard, et ainsi n’étoient nullement des occasions prochaines de péché : au lieu que ceux qui les entreprennent sans ce mouvement extraordinaire, tombent dans une témérité criminelle , et méritent de périr dans le danger qu’ils ont recherché, ou qu’ils n’ont pas eu soin d’éviter, selon cette parole du sage : « Qui amat periculum peribit in eo ? »


IV. Saint Thomas faussement allégué touchant la simonie.


Les jésuites ne pouvoient pas mieux faire paroître qu’ils sont capables de tout pour défendre leurs erreurs, qu'en alléguant saint Thomas pour autoriser la doctrine de l’apologiste, qui soutient, après Valentia, Milhard et plusieurs autres, que quiconque est dans une volonté actuelle ou habituelle de ne pas égaler une chose temporelle à une spirituelle (ce qu’il appelle ne pas la donner par forme de prix), peut donner de l’argent comme motif principal pour avoir un bénéfice, sans commettre une simonie contre le droit divin ; et que même, s'il le donne sans au-