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LA GUERRE DES DIEUX,

Il lui fallait croiser sa double main,
Non pas dessus, mais au-dessous du sein,
Et sur ce cœur que l’innocence habite,
Mais qui pour lors plus vivement palpite.
Pour être saint, l’on a beau tout braver ;
Cette posture est douce, et fait rêver.
Nos voyageurs, qu’un trouble vague agite,
Rêvaient beaucoup, et leur ame séduite
Se complaisait dans ce fatal oubli.
Mais une croix sur la route placée
Frappe leurs yeux, épure leur pensée
Et rend la force à leur cœur amolli.
« Notre projet, dit Thaïs, est louable ;
Dieu l’inspira, mais nous débutons mal.
Oui, nous péchons par un luxe coupable.
Vit-on jamais ermites à cheval ?
Allons à pied, mon ami ; cette allure
Est à-la-fois plus modeste et plus sûre. »
À pied tous deux poursuivent leur chemin,
Et, sans s’asseoir, marchent une heure entière.
Lassés alors, dans un bosquet voisin
Ils vont chercher un repos nécessaire.