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PARIS RÉVOLUTIONNAIRE

tant au cou une chaîne d’argent. Peu à peu les banquettes recouvertes de tentures vertes, réservées aux députés, se remplissent. On annonce le président qui monte à son bureau : un coup de sonnette, et la séance est commencée.

Bien mouvementées ces séances : on y fait souvent beaucoup de bruit et peu de besogne. Les orateurs se succèdent à la tribune ; mais on les entend à peine, tant la salle est longue et le public bruyant. Sur la piste circulent, en habit noir, l’épée dorée au côté, quatre huissiers bien frisés, chapeau bas. Ils crient incessamment : Silence ! En place ! Les députés, en costume négligé, bon nombre d’entre eux bottés et éperonnés, encombrent la piste ils vont, viennent, tapotent leurs bottes avec leurs cannes, toussent, crachent, parlent haut et interpellent à distance. Le Président a beau agiter son énorme sonnette, s’époumoner à dire : Silence ; En place, Messieurs ! Les huissiers frappent en vain des mains et s’épuisent à crier : Chut ! MM. les députés s’en soucient autant que des écoliers indisciplinés qui savent bien que le vieux magister ne tapera pas[1]. La grande attraction, ce sont les défilés à la barre des députations départementales ou faubouriennes, et des patriotes désireux de faire montre de civisme.

Un jour, ce sont les membres de la Société académique d’écriture qui font hommage à l’Assemblée du portrait de J.-J. Rousseau en traits de plume : « ils joignent leurs serments à ceux de tous les Français, et ils s’engagent à convertir, au premier cri du danger, en instruments guerriers les instruments de leur art. »

Une autre fois, c’est M. l’abbé Burnett, aumônier de la garde nationale, qui se présente à la barre accompagné d’une femme poussant devant elle deux enfants ahuris et tenant un troisième enfant dans ses bras. L’abbé Burnett, d’une voix forte, « annonce que cette femme est la

  1. Un Prussien en France en 1792.