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Notre arme la plus invincible fut pendant bien des siècles la furia francese.

On ne saurait faire l’histoire de notre prépondérance en Europe, sans y mêler un peu celle de nos épigrammes et de nos bons mots.

Dieu me garde de viser ici au paradoxe, mais il me semble que la France n’est plus tant redoutée depuis qu’elle est devenue si sérieuse.

D’ailleurs il y a je ne sais quelle rare outrecuidance à prétendre l’emporter ainsi sur la gravité britannique. La partie n’est pas égale assurément, et nous en voyons les effets.

Et ce que j’insinue là touchant notre posture en face de l’étranger, comme parlerait M. Mauguin, je l’affirme en ce qui regarde plus particulièrement nos affaires de famille.

Ici et là, au-dedans comme au-dehors, la situation est la même. Nous avons pris les choses d’une maladroite façon. Nous nous imaginons, niais que nous sommes, que nos trente journaux graves sont plus graves, à eux trente, que l’imperturbable austérité, la parole solennelle, et je dirai presque le sang-froid britannique de monseigneur l’apôtre de la Doctrine. À d’autres ! Croyez-moi, ne combattez pas avec des armes qui vous sont étrangères, et que vos adversaires du dehors, comme vos ennemis du dedans, manient infiniment mieux que vous.

Sifflez davantage, et pérorez moins.

D’où je conclus que notre sérieux de fraîche date nous habille mal, et que c’est faire un métier de dupe que de lutter de morgue avec la morgue incarnée. Laissons-là les sermons, et retournons à l’épigramme.

Voilà toute la pensée des pages qui vont suivre.

Nous étions convaincus, en dépit de la médisance, qu’on pouvait, avec un peu de soin, retrouver encore sous le Paris dissertant, quelques traces précieuses du Paris chantant.

Faut-il le dire ? En nous amusant à rassembler ces bribes trop éparses, nous pensions un peu aux historiens futurs. Oui, nous songions avec effroi que la Clio des siècles à venir n’aurait à compulser, dans ses doctes loisirs, que le Constitutionnel ou le Courrier Français, et si nous avons persévère jusqu’à la fin dans ce travail futile en apparence, c’est pour empêcher que la