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les lire. De là on voit au levant la France, au couchant l’Espagne[1]. C’est dans ce lieu même que Roland sonna son cor quand il appela Charlemagne à son aide, et il le sonna si fort qu’il le fit crever… Ayant quitté cette chapelle, nous commençâmes à descendre pendant un quart de lieue, tant que nous découvrîmes ce Roncevaux[2] si désiré de nous, ce qui nous causa une allégresse d’autant plus grande qu’eue était plus imprévue, parce que, l’hospice étant caché par les montagnes et par des arbres très touffus, nous pensions en être très éloignés quand nous nous trouvâmes en face des portes. Nous y descendîmes donc et nous entrâmes sous une grande voûte, dans laquelle, à main droite, il y a beaucoup de tombeaux antiques, où se conservent les cendres de nombreux rois, ducs, marquis, comtes, paladins et seigneurs qui moururent dans ce grand fait d’armes, mémorable pour tous les siècles. A main gauche est la grande église, qui est très ancienne : c’est Charlemagne qui la fit faire, et l’archevêque Turpin y a dit la messe… Devant le grand autel il y a une grande et forte grille de fer, très élevée, au haut de laquelle est attaché le cor de Roland, de la longueur d’environ. deux brasses ; il est tout d’une pièce, et il a une fente du côté par où sort la voix, laquelle fente on dit qu’il fit à l’heure où, sur la cime des Pyrénées, il sonna pour appeler Charlemagne, qui était campé à Saint-Jean-

  1. Ou, plutôt, au nord et au sud. — Au reste, d’Ibañeta on ne voit pas la France, le Val Carlos, qui appartient au versant nord, ayant toujours été espagnol.
  2. Par « Roncevaux », Laffi entend ici l’hospice.