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nous occupe, qu’il met dans la bouche de Barlaam inculquant au jeune Joasaph la doctrine chrétienne. Voici comment il le rapporte :

Un oiseleur [1] avait pris un des oiseaux les plus petits (on l’appelle un rossignol), et il allait le tuer avec son couteau, mais l’oiseau reçut la faculté de parler et lui dit : « A quoi te servira-t-il de m’ôter la vie ? Tu ne pourras apaiser ta faim avec mon corps ; mais si tu voulais me relâcher, je te donnerais trois préceptes qui, si tu les suis bien, pourront t’être d’un grand avantage. » L’oiseleur surpris d’entendre l’oiseau parler, promit de le relâcher s’il lui communiquait ces trois utiles préceptes. « Écoute donc, » dit l’oiseau. « Voici le premier : N’essaie jamais d’atteindre une chose qui ne peut être atteinte, Voici le second : Ne te chagrine pas pour une chose perdue et impossible à recouvrer [2]. Voici le troisième : Ne crois jamais à une parole incroyable. Observe ces trois recommandations et tu t’en trouveras bien. » Le chasseur laissa donc l’oiseau s’envoler, comme il le lui avait promis. Et le rossignol, en voltigeant au-dessus de sa tête, se mit à chanter doucement ; puis, sa chanson finie, voulant savoir si l’homme avait compris la valeur de ses préceptes et en avait retiré quelque utilité, il lui dit : « Que

  1. Au lieu d’ἰξευτἠς le manuscrit grec suivi par le traducteur latin portait sans doute τοξευτἠς, qu’il a rendu par « sagittarius ».
  2. Le texte porte μὴ μεταμελοῢ ἐπἱ πράγματι παρελθόντι, mais la traduction latine qui donne : Ne doleas de re pevdita et irrecuperabili, reproduit sans doute mieux l’original, comme le montre la comparaison d’autres versions et du texte grec lui-même plus loin.