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FRANÇOIS VILLON.

neurs que pour la reine, et le prévôt de Paris, Ambrois de Loré (le beau-père de Robert d’Estouteville), était publiquement le protecteur des « folles femmes ».

Villon, pour avoir volé et crocheté, ne se sentait pas positivement digne de mépris, bien qu’il éprouvât de ses fautes du regret et de l’humiliation, et ses contemporains ne le jugeaient pas non plus comme nous ferions son pareil. Cela tient en grande partie à ce qu’alors la morale civile ou mondaine n’était pas séparée de la morale religieuse. Enfreindre n’importe lequel des commandements de Dieu, celui qui défend de voler ou même celui qui défend de tuer et celui qui défend de forniquer, c’était un péché également mortel ; et ce n’en était pas un moindre, si ce n’en était un pire, d’enfreindre un des commandements de l’Eglise. Le Bourgeois de Paris, après avoir rapporté toutes les atrocités des Écorcheurs, ajoute, pour mettre le comble à l’horreur qu’il veut inspirer : « Item, ils mangeaient chair en carême, fromage, lait et œufs, comme en autre temps[1] ». Or tous les hommes sont pécheurs, et tous les péchés se lavent par la pénitence : on ne faisait pas entre eux la différence que nous établissons aujourd’hui. Ce que nous appelons honneur n’existait pas ou était à peine distinct.

Villon ne se sentit donc, à aucune époque de sa vie, tombé dans l’abjection morale à laquelle serait

  1. Il était alors défendu, en carême, de manger du laitage et des œufs aussi bien que de la viande : on devait se contenter de poisson et de légumes cuits à l’huile ou au craspois (graisse de baleine).