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LA VIE.

mina pour l’exil, nanti de ce que les siens avaient pu encore ramasser d’argent.

A partir de ce moment, nous perdons toute trace de notre poète. Il est probable qu’il mourut loin de Paris, avant l’expiration de son temps d’exil, puisque nous n’avons aucun indice de son retour dans la capitale. Rabelais a situé à cette époque de la vie du poète deux anecdotes qu’il met sur son compte. La première, qui se passe en Angleterre, attribue à Villon un bon mot patriotique que l’on avait prêté, au xIIIe siècle, à Primat d’Orléans, personnage à demi mythique, représentant par excellence de la poésie des « goliards » ou clercs « vagants ». La seconde a plus de chances d’être vraie dans le fond, sinon dans les détails. C’est, comme le montre la précision des renseignements topographiques, une tradition recueillie sur les lieux mêmes. Villon, « sur ses vieux jours », — entendez « dans les derniers temps de sa vie », car il n’eut pas de vieux jours, — se serait retiré en Poitou, à Saint-Maixent, « sous la faveur d’un homme de bien, abbé dudit lieu », et y aurait fait représenter la Passion « en langage poitevin ». Un sacristain des Cordeliers, frère Étienne Tappecoue, ayant refusé de lui prêter (comme cela se faisait d’ordinaire) des vêtements sacerdotaux pour habiller quelques-uns de ses personnages, Villon se serait cruellement vengé de lui : il aurait embusqué ceux qui devaient faire les diables dans son mystère, munis de leurs déguisements bizarres, de leurs cornes, des instruments de leur musique infernale, dans un endroit où le sacristain devait passer, et, se jetant tous à l’improviste au