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FRANÇOIS VILLON.

On juge de la joie du poète quand on lui annonça la bonne nouvelle. Il lança aussitôt, comme une fusée d’allégresse, une vive ballade à l’adresse du greffier ou « clerc du guichet >» de la Conciergerie, nommé Garnier, avec lequel il s’était lié :

Que vous semble de mon appel,
Garnier ? fis je sens ou folie ?...

Guidiez vous que sous mon chapel
Y eust tant de philosophie
Comme de dire : « J’en appel » ?
Si avoit, je vous certifie
(Combien que pas trop ne m’i fie).
Quant on me dit, présent notaire :
« Pendu serez », je vous affie,
Estoit il lors temps de me taire ?

Mais il adressait aussitôt à la cour du Parlement, également en forme de ballade, une requête d’un tout autre ton. Sa reconnaissance, pour être exprimée d’une façon assez grotesque, n’en est pas moins sincère. Mais le véritable objet de la pièce est dans l’Envoi, où il dit :

... Trois jours ne veuillez m’escondire[1]
Pour moi pourveoir et aux miens a Dieu dire :
Sans eux argent je n’ai, ici n’aux changes.
Court triomphant, fiât, sans me desdire !

La cour lui accorda sans doute le sursis qui faisait l’objet de son humble requête : Villon obtint les trois jours de libre séjour à Paris qu’il demandait; il put aller embrasser sa mère, dire adieu à Guillaume de Villon, qui bien probablement lavait « mis hors » du plus terrible « bouillon » où il se fût jeté, et s’ache-

  1. Me refuser.