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FRANÇOIS VILLON.

Se Fortune a sur moi envie,
Jugez s’elle fait mesprison[1].
Il me semble que par raison
Elle deust bien estre assouvie !
Se si pleine est de desraison
Que vueille que du tout dévie[2],
Plaise a Dieu que lame ravie
En soit lassus[3] en sa maison !

Le même sens résulte du passage où il dit, en parlant de maître Guillaume de Villon, qu’il l’a tiré de maint « bouillon » (tourbillon, et au figuré péril) et qu’il ne se réjouit pas « de celui-ci », du péril présent :

Si lui requier a genouillon
Qu’il m’en laisse toute la joie.

C’est dans ces dispositions, mêlées de contentement et de repentir, de crainte et d’espérance, qu’il écrivit le Testament. Il y mit sa vie tout entière, tous ses souvenirs et tous ses sentiments. Il ne le laissa pas circuler, probablement, avant d’être sûr de pouvoir se montrer à Paris sans danger : il aurait trop risqué, en le publiant plus tôt, d’appeler sur lui l’attention de la justice.

Nous ne savons comment Villon fut rassuré sur ce qui lui causait tant d’inquiétude à la fin de 1461 ; peut-être ses amis, et notamment (malgré la requête du poète) Guillaume de Villon, intervinrent-ils encore une fois. Quoi qu’il en soit, il revint à Paris avant la fin de 1462 et reprit son ancien logement au cloître Saint-Benoit. Il y a malheureusement des raisons de croire que, loin de tenir les bons propos

  1. Si elle a tort.
  2. Que je meure tout à fait.
  3. Là-haut.