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LA VIE.

de l’hôtel royal de Saint-Paul), revenait par le quartier du Temple et la vaste « couture » qui le prolongeait, observait la singulière chapelle de Sainte-Avoie, située au premier étage, et se demandait comment on pourrait s’y faire enterrer, se rafraîchissait, faute de mieux, quand sa bourse était vide, à la fontaine Maubuée, rue de la Baudroie, traversait la place de Grève et allait causer à quelqu’une des « fenêtres » où se tenaient les « écrivains » de la Pierre-au-Lait, près de Saint-Jacques-la-Boucherie, ou descendait la Seine le long de l’abreuvoir Popin, qu’il rêvait d’emplir de vin pour y désaltérer son ami Jacques Raguier. Cette idée le menait naturellement au cabaret des Trumelières, près des Halles, où il lui arrivait, pour payer soit son écot, soit ses pertes de jeu, de laisser en gage jusqu’à ses « braies ».

Mais un but favori de ses courses dans ce quartier était le fameux cimetière qui entourait l’église des Saints-Innocents. Arrêtons-nous un instant avec lui en ce lieu étrange, où se mêlaient, dans la promiscuité habituelle au moyen âge, les plus graves appels de la religion et les plus familières préoccupations du siècle, le grouillement de la vie et le silence éternel de la mort.

Le cimetière des Innocents occupait le vaste terrain jadis appelé les Champeaux, là où sont aujourd’hui les Halles. Il avait été entouré par Louis VII d’un haut mur percé de quatre portes. À ce mur s’adossaient de belles arcades gothiques, formant quatre spacieuses galeries au-dessus desquelles régnaient des « galetas » élevés, prenant jour par de