Page:Paris - François Villon, 1901.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
13
LA VIE.

qu'on ne fît révoquer la rémission comme obtenue subrepticement, et il était en tout cas très exact dans les circonstances indifférentes à la culpabilité. De là vient que les lettres de rémission nous ont conservé une foule de petits tableaux de mœurs d'une vie et d'une couleur incomparables. Nous voudrions bien avoir celle que Louis XI accorda à Villon : nous y apprendrions non seulement ce qui lui avait valu d’être enfermé dans une prison si rigoureuse, mais encore sans doute plus d'un fait de sa vie antérieure, car les lettres de rémission mentionnent souvent, pour les absoudre, des délits antérieurs à celui à l'occasion duquel elles sont données. Malheureusement elle s'est perdue, comme bien d'autres documents qui nous auraient permis de reconstituer cette vie dont les étranges vicissitudes avaient nécessairement laissé dans les archives judiciaires des empreintes bien plus nombreuses que celles qui ont été jusqu'ici découvertes.

Tâchons cependant, à l'aide des pièces officielles qui ont été retrouvées et de ce que le poète nous dit de lui-même, de nous figurer la façon dont avait vécu jusque-là le prisonnier que Louis XI, sans savoir probablement le don qu'il faisait à la poésie française, arrachait en octobre 1461 aux sombres oubliettes du château de Meun.

Villon, en sortant de prison, avait trente ans, nous l'avons déjà vu. S'il commence son Testament, composé peu après, en disant :

En l'an trentiesme de mon aage,


c'est pour avoir un vers bien frappé et un chiffre